Il est temps de lancer un débat engagé sur les bilatérales III

Commentaire de Simon Michel, Felix Ehrat, Kaspar Wenger – 1er août 2024

Dans son article à la fois pragmatique et pertinent paru dans la NZZ le 23 juillet dernier sur le sens et le but des Bilatérales III, le conseiller fédéral Beat Jans se demande si « ils ont raison ». Ils ? Ceux qui veulent faire cavalier seul et qui mettent en garde contre une perte de souveraineté, si un nouveau paquet d’accords avec l’UE devait être signé.

« Non, car dans un monde interconnecté et complexe, on renforce sa propre souveraineté en clarifiant, en pérennisant et en renforçant ses relations avec des partenaires importants », conclut-il de façon limpide.

Deux jours plus tard, l’ancien conseiller fédéral Ueli Maurer réagit avec véhémence à l’article de Beat Jans : « La principale justification avancée par le conseiller fédéral Jans est que cela renforcerait la souveraineté suisse. C’est presque une déformation malveillante des faits ».

L’intervention du conseiller fédéral Jans sur la question du renforcement de la souveraineté de la Suisse par les Bilatérales III et la réaction de l’ancien conseiller fédéral Ueli Maurer, en parallèle d’une campagne d’affichage en Suisse alémanique en faveur d’un référendum à la double majorité sur le futur accord, montrent qu’un débat sur la poursuite de la voie bilatérale est nécessaire et urgent. Et cela, ne serait-ce que parce que Beat Jans et Ueli Maurer ont des conceptions totalement différentes de la « souveraineté ». Pour Beat Jans, il s’agit d’une souveraineté coopérative, qui sert à instaurer la paix, la prospérité et le bien commun. La Suisse a une excellente expérience en la matière, puisque les relations entre la Confédération et les cantons sont notamment basées sur ce principe.

Dans l’historiographie nationaliste des 19e et 20e siècles, la souveraineté a été idéalisée et réinterprétée pour mieux correspondre à l’image de l’État-nation. Ceux qui, comme l’ancien conseiller fédéral Maurer, évoquent la souveraineté, veulent tirer la sonnette d’alarme et proclamer qu’il ne s’agit rien de moins que de la liberté, de l’indépendance et de l’autodétermination de la Suisse. Les opposants aux accords avec l’UE ont fait de cette conception traditionnelle leur mantra.

Christina Neuhaus de la NZZ a raison lorsqu’elle écrit que « la discussion sur les avantages et les inconvénients du paquet de négociation n’a encore guère atteint le public ». C’est justement pour cette raison que la contribution de Beat Jans est bien plus qu’un « léger raclement de gorge » (citation de Neuhaus, NZZ, 27 juillet). Autonomiesuisse l’a même qualifié de « fake news ». Ce n’est pas ainsi que le débat devrait se dérouler !

C’est aux partis, aux associations et aux organisations telles qu’economiesuisse, l’Union patronale suisse, l’Union suisse des arts et métiers et les dizaines d’associations économiques de mener ce débat de manière résolue et engagée. Nous désirons, en tant que mouvement, montrer de façon objective les avantages et les inconvénients d’une poursuite de la voie bilatérale entre la Suisse et l’Union européenne. Ce débat est crucial, et nous regrettons les tentatives des opposants d’étouffer la discussion politique et leurs appels à s’éloigner de l’UE. Nous nous rappelons l’effet que leur position a eu il y a trois ans : les « décideurs » ont eu peur de se brûler les doigts auprès des électeurs et des partis. Et nous ne pouvons que constater que la situation n’a pas progressé.

Il ne doit pas en être ainsi aujourd’hui ! De bons débats sont une condition préalable à une démocratie vivante et à une cohabitation réussie dans notre société diversifiée. Ils sont particulièrement nécessaires sur ce thème.

progresuisse prend la balle de Beat Jans au bond !